C’est avec émotion que je vous invite à me suivre aujourd’hui dans l’univers de Boris Dupoux, designer et fondateur de la manufacture de luminaire Vibe, implantée en Martinique depuis deux ans. Visionnaire, créatif, avenant, rigoureux, talentueux c’est dans son atelier que je retrouve cet entrepreneur novateur de 30 ans. Boris ou la grâce d’un génie qui a su suivre son rêve en innovant avec ses brevets tout en gardant simplicité, spontanéité et fraicheur. Il correspond en tout point à l’image même de l’entrepreneur de 2017 incarnant une vision positive de l’entreprenariat. Une ère où l’on sort de la perfection pour créer l’émotion et revenir au naturel, aux fondamentaux…
Un timbre de voix qui vous rassure, un sourire aux lèvres, un regard bienveillant, une propension à vouloir aider la jeunesse, une ouverture sur le monde, une démarche environnementale, c’est un entrepreneur qui fait le choix de s’encrer dans le bassin caribéen dont il n’est pourtant pas issu pour en faire ressortir toutes ses richesses. Au cours de notre échange une question se pose « quelle différence peux-on faire entre un homme d’affaire et un entrepreneur ? ». Pour Boris: « L’entrepreneur est celui qui va démarrer avec ses rêves, ses idées, qui prendra des risques. Prenons l’exemple de Steve Jobs et Tim Cook. Depuis le départ de Steve Jobs pas d’échec, mais pas de révolution non plus. Un entrepreneur fera des éclats et parfois de gros loupés mais il fera surtout des chefs d’œuvres. Etre entrepreneur c’est vivre différemment, inspirer et donner du sens aux choses… C’est prendre à contre pied le système, être critique sur ses capacités, prendre des jeunes qui ont envie de changer les choses pour passer un message de positivisme. C’est être agile, engagé et 100% responsable. C’est prendre le risque d’être déçu, d’échouer mais surtout de réussir. C’est être confronté à des situations de vie surréalistes où les banques vous disent NON ! C’est trouver son propre rythme, faire des concessions et savoir sortir de la posture de Superman. C’est faire de l’incertain son quotidien et accepter que l’on trouvera toujours des solutions. »
A travers cette interview de Boris Dupoux, je retrouve les valeurs communes des artistes, créateurs et designers que je vous fais découvrir depuis maintenant un an sur ÜART. C’est notre signature de mettre l’art en lumière à travers l’imaginaire d’artistes comme Helene Raffestin, Ricardo Ozier-Lafontaine, Jessie Bonne, David Gumbs, Joëlle Salomon, Olivier Compère. Merci !
Merci d’avoir accepté cette interview. Tout d’abord pourrais-tu te présenter pour ceux qui ne te connaitraient pas ?
implantée en Martinique depuis 2 ans, une première dans l’arc antillais.Je suis le fondateur de la manufacture de luminaires VIBE,
J’ai 30 ans, je suis originaire du Vercors-Alpes, du petit village de Pont-en-Royans.
Avant VIBE,
dans le luminaire (2 brevets) pour le compte d’un groupe, et manager des équipes techniques et commerciales entre la France et la Chine.j’ai créé une activité innovante
Après plusieurs années heureuses au sein de cette entreprise, j’ai souhaité changer d’horizon et le choix de la Martinique m’a été « subtilement » suggérée par ma compagne, martiniquaise…
Et me voilà aujourd’hui 3 ans après ce choix.
de l’activité, des objets, de la dynamique. Mon métier est de concrétiser des idées en quelque chose de tangible.Je cherche avant tout à créer,
Quel a été ton parcours ?
Ayant grandi dans un milieu industriel, je me suis orienté vers un cursus d’ingénieur généraliste (Centrale Marseille), diplôme que j’ai obtenu en 2009. En école, j’ai découvert le marketing, l’innovation et l’entrepreneuriat, et c’est ma première expérience professionnelle qui m’a mis le pied à l’étrier.
D’où te vient cette passion pour le design d’objet ?
Depuis mon plus jeune âge, j’imagine des scénarios d’usage et réalise les objets qui vont de paire.
J’ai toujours fabriqué et produit de mes mains, que ce soit avec mes aînés (mon grand-père par exemple) ou avec mes Légo.
Les procédés de fabrication m’ont fasciné tôt aussi par le lien étroit avec le dessein de l’objet: rien n’est laissé au hasard.
Quel message souhaiterais-tu faire passer aux jeunes ou moins jeunes afin de les motiver à se réaliser pleinement ?
rêvez, acceptez les contraintes… et exploitez les pour accomplir ce qui vous réalisera.
Quelles sont les qualités requises pour épouser ce métier ?
Il faut principalement beaucoup de savoir-être: respect et goût du travail, du travail bien fait. La curiosité, la sensibilité et l’envie d’aller plus loin aussi. Une tête bien faite c’est un plus.
Pourrais-tu nous décrire ton style ?
Fonctionnel et évident.
Qu’essaies-tu de transmettre à travers ton exercice?
La lumière c’est l’énergie première que la Terre reçoit, c’est aussi de l’information: une vibration avec laquelle on vit.Des émotions et du sens.
Qu’est ce qui t’inspire aujourd’hui ?
Ce qui m’intrigue c’est de déterminer leur processus de création.Les motifs qui nous entourent, que ce soit des formes ou des rythmes, naturels ou artificiels m'inspirent.
Et spécialement en ce moment, l’esthétique japonaise aussi bien passée que contemporaine: architecture, peinture, design, cuisine, littérature.
As-tu des matières de prédilection ?
Le béton parce que j’aime le mouler et le sculpter.
La calebasse pour sa douceur.
La fibre de bananier pour la surprise que l’on ressent quand elle s’illumine.
Peux-tu nous expliquer ta démarche dans un univers caribéen ?
L’esthétique caribéen est réel et pluriel. Il est fait de contraintes, il est fait de la nature aussi. La Caraïbe est très vivante.
parce que c’est déjà difficile. Les conditions de vieillissement des matériaux par exemple, sont spécifiques. Rencontrer beaucoup de gens, observer et dessiner ma propre voie même si elle parait différente de la norme.J’ai dû apprendre à faire simple et bien,
En quoi puises-tu pour te dépasser au quotidien ?
Le plaisir d’accomplir.
Boris en quelques mots ça donnerait quoi ?
Envie, Réflexion, Sens, Énergie, Rêves, Émotion, Réflexion, Simplicité, Imagination, Rêve.
Selon toi l’élégance c’est ?
L’élégance c’est un équilibre subtil, à la fois fois une beauté naturelle et le souci du détail.
Une mise en condition particulière avant une période de rush ?
Respirer profondément, observer le parcours en détails, créer de la place pour les imprévus et gravir un sommet: observation, rythme et concentration.
Un conseil pour avoir une maison stylée ?
Ne pas chercher à la décorer, mais à la vivre pleinement ! Les objets n’en seront alors que mieux choisis, les espaces mieux agencés, et l’harmonie sera là.
Et solliciter l’expertise de professionnels.
Le plus beau compliment que l’on puisse te faire ?
Avoir partagé un agréable moment.
Une fin de journée au pied de l’Everest avec ma compagne. Indescriptible…
Qu’est ce qui te fait rire ?
L’ironie et l’humour noir.
La tendance phare du moment ?
Le design scandinave je pense, mais je ne suis pas très au fait des tendances.
Une petite sélection coups de cœur ?
L’artiste Olafur Eliasson, l’Ecosse, le dernier clip de Patrice (Burning Bridges), ma nouvelle cafetière.
Quelle est la différence entre un chef d’entreprise et un entrepreneur?
Il ne sera pas nécessairement conformiste et ne cherchera pas forcément à respecter les codes mais plutôt à les questionner. Ce qui l’anime est plus profond que les performances seules de l’entreprise.Un entrepreneur cherche à créer et réaliser une vision qu’il a de son entreprise.
D’un autre côté, un homme d’affaires sera enclin à respecter le protocole, les procédures, et assurer une sécurité à la conduite de l’entreprise. Il fera surement ce qui est logique et bon de faire.
Peut-on créer toute sa vie ?
Les risques viennent parce que l’on a l’espoir d’un gain, mais surtout dans mon cas, de l’accomplissement d’une idée. Tant que cette envie anime, alors on le peut ! Cela dépend de ce que l’on attend de sa vie, et de nos rêves.
Qu’est ce que le bonheur selon toi ?
Se réjouir de ce que l’on a, apprécier chaque instant partagé, ou avec soi-même.
Dans la série si tu étais
Si tu étais une matière tu serais ? Pourquoi ?
L’eau, c’est la vie et elle me fascine sous tous ses états.
Si tu étais un animal tu serais? Pourquoi ?
Un chamois, pour gravir des pentes escarpées jusqu’aux sommets.
Si tu étais un style tu serais? Pourquoi ?
Le minimalisme, parce que je n’ai pas besoin de plus.
Si tu étais une citation tu serais ?
Avant donc que d'écrire, apprenez à penser. Selon que notre idée est plus ou moins obscure, l'expression la suit, ou moins nette, ou plus pure. Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément. - Nicolas Boileau
Si tu étais l’une de tes créations tu serais ?
Celle de demain.
Si tu étais un geste tu serais ?
Je serais un pas.
La vie étant une somme d’événements parle nous des expériences acquises mais aussi de ton expertise. Comment se passe ta vie de designer en Martinique?
Je suis arrivé en Martinique avec une étiquette d’ingénieur, peut-être que tout simplement que
J’apprécie de travailler en Martinique pour la qualité de vie notamment , mais aussi pour la dynamique professionnelle aujourd’hui autour de VIBE.la Martinique est le lieu où je commence à exprimer ma créativité.
Comment arrives-tu à capter les besoins de tes clients ?
Je les écoute, pas seulement pour ce qu’ils veulent me dire, mais sur ce qu’ils veulent se dire, à eux-mêmes.
L’approche environnementale est-elle capitale selon toi dans le milieu du design ?
La base, oui ! La résultante de toutes les réflexions du designer est la création de liens entre le milieu et l’utilisateur. Évidemment, la nature en fait partie.
Dans un processus de création est-il important de satisfaire les besoins ou de les créer ?
En revanche il y a de nouvelles façons d’y répondre, de plus en plus élaborées, donc de nouveaux usages.Je ne crois pas en la création de besoins.
Que penses-tu de la démarche de Gordon Matta Clark ?
Effectuer des coupes de bâtiments, « cuisiner » la matière, je vois sa démarche comme de l’ingénierie : un travail méticuleux, organisé et expérimental avec une valeur d’étude.
Le design à t-il encore un avenir n’est-on pas arrivé au paroxysme de ce que l’homme pouvait créer ? doit-on encore aller plus loin ?
Je ne sais pas ce qu’est aller plus loin, l’évolution n’est pas linéaire, et a-t-elle une destination ?
Les usages évoluent suivant les contextes, et
le design n’est pas figé, il est une des réponses possibles à des questions circonstancielles.
Comment ancres-tu ta société dans le bassin caribéen ?
En concevant et produisant ici déjà, puis en cherchant à développer des partenariats locaux.
En répondant aux spécificités climatiques tropicales:
les produits ne vieillissent pas de la même manière dans un environnement chaud et humide.
En inscrivant mes produits dans l’esthétique caribéenne, avec un « je-ne-sais-quoi » de nouveau.
En tant que jeune chef d’entreprise quels conseils pourrais-tu donner à ceux qui voudraient se lancer dans l’aventure entrepreneuriale ?
Écoutez, observez, analysez, créez l’émotion, identifiez les problématiques. Et méticuleusement, résolvez les, en restant sceptiques mais déterminés.
Peux-tu nous parler de ta démarche de recrutement et d’insertion de la jeunesse au sein de ta structure ?
J’ai eu la chance de rencontrer des jeunes qui avaient envie de faire les choses différemment et avaient à coeur de les faire du mieux possible.
Il y a 8 ans, j’étais dans ce même état d’esprit et
on m’a fait confiance. Il était donc naturel de faire à mon tour confiance.
Selon toi que manque t-il à la Martinique pour devenir une destination incontournable du design et à contrario quels sont nos points forts ?
Chacun peut s’approprier la démarche à sa façon, et l’exprimer. Après, est-ce qu’il faut un lieu, un cluster, de la formation, de la communication ? Il faut déjà que quiconque le souhaite, fasse un pas dans cette direction.Il manque une dynamique sectorielle, trop de gens pensent que le design c’est une question d’argent.
Parce que nous avons des points forts: des outils de production artisanaux, des savoirs-faire, des matériaux locaux nobles, une image à l’international et un système scolaire de qualité.
As-tu encore des rêves ? Sur quel grand projet aimerais-tu travailler ?
Heureusement, et tout le temps !!! Difficile de choisir un seul projet: un lieu de fabrication, d’expérimentation et d’apprentissage, sur le thème du design et de l’innovation industrielle. Ou alors un nouveau brevet…
Je vais te demander de fermer les yeux de faire appel à tes 5 sens et de me dire ce qui te vient quand on te dit Martinique.
Une émotion: la joie !
Un dernier message aux lecteurs de ÜART ?
Paul Valéry, Cimetière marin.Le vent se lève ! … Il faut tenter de vivre !
Merci encore pour ce moment privilégié en espérant te voir très bientôt.
ÜART.
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Boris Dupoux
T. +596 (0)696 53 27 60
@. boris.dupoux@lightisvibe.com
Web. www.lightisvibe.com
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