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30 Oct

Bail commercial et nullité de la clause d’échelle mobile ne jouant qu’à la hausse

C’est la rentrée et nombreux d’entre vous ont encore des interrogations concernant les baux commerciaux. Vous êtes entrepreneurs ? Chefs d’entreprises? Pas de panique voici quelques conseils de Maitre Taniev Labéjof afin de vous aider à y voir clair.

4-433 Bien souvent peu analyser juridiquement lors de sa signature ou de la cession de fonds de commerce dans lequel il est le socle, le bail commercial peut constituer un acte contraire aux intérêts pour l’entrepreneur, preneur à bail.

En effet, s’il est classique de parler de baux commerciaux « pro-propriétaire », ces baux ne doivent pas pour autant être contraire aux règles régissant cette matière puisqu’il convient de rappeler que le bail est avant tout un acte encadré par le Code de commerce dont certaines règles sont d’ordre public.

À ce titre, force est de constater que nombre de clauses sont incorporées dans les baux alors qu’elles sont « contra-legem ».

En ce sens, si la clause d’échelle mobile prévue par l’article L.145-39 du Code de commerce est mal rédigée, elle peut être nulle.

Il est ainsi fréquent d’analyser dans les baux commerciaux, une clause d’échelle mobile ne jouant qu’à la hausse ; plus précisément, il est généralement et similairement stipulé que :

« L’indice servant de référence pour le calcul de base ne pourra, en aucun cas, avoir pour effet de ramener le loyer à un montant inférieur au loyer de base ».

Par exemple, si le loyer de base est de 1.500 € et que par application du nouvel indice, il doit être à 1.200 €, une telle clause empêche la révision et laisse le loyer à 1.500 € en attendant la prochaine hausse.

Or, souvent en déficit de conseil, nombre de preneur à bail ne pense pas qu’une telle clause est nulle et ne sollicite pas la diminution du loyer.

Cependant, à leur décharge, la jurisprudence ne s’était pas encore totalement prononcée sur la question.

Bien que certains arrêts de cour d’appel étaient favorables à la nullité, il aura fallu attendre l’arrêt du 14 janvier 2016 de la Cour de cassation (la plus haute juridiction civile nationale) qui a jugé que :

« Mais attendu, d’une part, qu’est nulle une clause d’indexation qui exclut la réciprocité de la variation et stipule que le loyer ne peut être révisé qu’à la hausse ;

qu’ayant relevé, par motifs adoptés, que la clause excluait, en cas de baisse de l’indice, l’ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l’indice publié dans le même temps, la cour d’appel, qui a exactement retenu que le propre d’une clause d’échelle mobile était de faire varier à la hausse et à la baisse et que la clause figurant au bail, écartant toute réciprocité de variation, faussait le jeu normal de l’indexation, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ».

En l’espèce, le bail litigieux prévoyait que :

« La présente clause d’échelle mobile ne saurait avoir pour effet de ramener le loyer révisé à un montant inférieur au loyer de base précédant la révision ».

De sorte que si l’indice avait baissé, le preneur ne voyait pas son loyer diminué.

La position de la Haute juridiction civile se justifie au regard des articles L.145-39 du Code de commerce et L.112-1 du Code monétaire et financier.

Aux termes de l’article L.112-1 du Code monétaire et financier, est réputée non écrite toute clause d’un contrat à exécution successive prévoyant la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision.

Or, l’interdiction d’une révision à la baisse du loyer va à l’encontre de l’application de l’indice.

Autrement dit, lorsque les parties souhaitent conditionner leurs rapports contractuels à un indice, elles doivent « jouer le jeu » et accepter tant les hausses que les baisses.

Pourtant, la Cour d’appel de Paris n’a pas hésité à modifier ses positions concernant le sort à réserver à cette clause. C’est ainsi que le 2 juillet 2014, elle la considérait comme non valable mais le 20 janvier 2016, six jours après l’arrêt de la Cour de cassation, ladite Cour de Paris va prendre une position différente en statuant pour la validité d’une telle clause.

Néanmoins, le 13 avril 2016, la Cour de Paris s’est alignée sur le principe énoncé par la Cour de cassation.

C’est dire que la décision de la Cour de cassation est venue trancher l’ambiguïté qui entourait le sort à réserver à cette clause.

Il s’ensuit qu’il convient de vérifier l’existence de cette clause qui, en l’absence de baisse du loyer, alourdira les dépenses de la société, notamment en cas de cession de fonds de commerce. Plus précisément, il s’agit de refuser l’application de ladite clause, de déterminer le loyer révisé à la baisse et d’exiger l’application dudit loyer.

D’ailleurs, il y a lieu de préciser que la jurisprudence a un effet rétroactif dans la mesure où il s’agit d’une interprétation donnée par la Haute juridiction.

Ainsi, quid des périodes dans lesquelles le bailleur n’a pas révisé le loyer à la baisse ? Un reversement des loyers indûment perçus serait à prévoir dans la limite des délais de prescription.

Toutefois, avant tout contentieux, il est souhaitable d’apporter cette nouvelle jurisprudence au bailleur dans la mesure où la contestation semble inexistante.

Contributeur

Maître Taniev LABÉJOF

Avocat

Droit des affaires – Droits immobilier & construction – Droit bancaire

Tél. : 05.96.73.78.48 / Fax : 05.96.73.78.08

Email : taniev.labejof@avocat-conseil.fr

www.cabinet-labejof.fr

Yetta.U

Epicurienne dans l'âme, passionnée d'art et de design partagez avec moi mon univers teinté d’influences caribéennes et de mes coups de coeurs de part le monde. Tel une cure de jouvence entrez vous aussi dans le bain ÜART !

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