Depuis mon plus jeune âge je sais que chaque femme est un roman qu’il nous est permis de lire ou pas. Aujourd’hui à l’occasion de la journée de lutte pour le droit des femmes c’est un immense honneur pour moi de recevoir la talentueuse Loriane Zacharie, artiste, auteur et interprète d’origine Martiniquaise. Solaire, altruiste, combative, sensible, rêveuse, perfectionniste, la délicieuse Loriane brille depuis plusieurs années par son charisme au devant de la scène. Loriane est, plus qu’une chanteuse, une énergie, une signature vocale à en donner des frissons, des textes à en perdre le La. Elle distille des mélodies suaves et enivrantes qui nous emportent sur les chemins de l’amour tout cela dans une humilité folle. Vous l’aurez compris, je suis totalement fan!
Rencontrer Loriane, c’est faire face à un joyeux mariage entre force et sensibilité. Elle incarne, selon moi, l’intensité dans tous ces états. Elle est l’une de ces femmes qui vous font vibrer, vous bousculent. Tel un souvenir qui s’ancre à jamais en vous. Une femme forte, déterminée. De celles qui savent ce qu’elles veulent et vont droit au but. Sans mascarade, juste en se permettant d’apporter à la vie l’être authentique et active qu’elles sont. Pas de posture de victime, elles connaissent leurs qualités et leurs défauts et les assument dignement pour être une femme entière. Une femme capable de vous envelopper de tout son amour, d’être ce soutien inébranlable, une véritable lionne. « An fanm doubout! » Voilà ce que m’inspire loriane. En somme, l’un de ces romans dont on connait la fin, que l’on garde tendrement et que l’on relit sans cesse.
Lors de cet entretient, nous abordons des questions essentielles sur l’actualité, sur l’histoire, et sur la condition féminine à travers le titre phare qui à lancé sa carrière « Lumina ». Car la diva est également un professeur d’Histoire-Géographie. Aujourd’hui, je vous offre à travers cette interview une invitation à sortir du cadre, à oser être soi, à choisir exactement la vie qui vous sied en dehors de toutes conventions, qu’elles soient matérielles, sociales ou autres… je vous laisse donc en compagnie de la belle loriane qui tel un bâton de cannelle parfumera vos vies. Laissez-vous donc emporter par un doux parfum couleur Caraïbe.
Merci d’avoir acceptée cette interview. Tout d’abord pourrais-tu te présenter pour ceux qui ne te connaitraient pas ?
Bonjour !
Loriane ZACHARIE: femme,
martiniquaise, afro-caribéenne, amoureuse de la Vie…Je crois que ces quelques mots dessinent assez bien les contours de mon identité. 🙂chanteuse, professeur d’Histoire-Géographie,
Quel a été ton parcours ?
Mon parcours ? Alors, s’il faut remonter jusqu’à ma naissance, cela risque d’être long (je ne suis plus toute jeune hein !). 🙂
Je commencerais en disant que la musique et le chant ont toujours irrigué ma vie. Mes parents m’ont abreuvé de musique de toutes sortes.
Très jeune, j’ai su que chanter ferait partie de ma manière d’exister au Monde.
Adolescente, j’ai participé à plusieurs concours de chant à l’échelle locale (« concours de la chanson créole », zoukamine futurstar ») et nationale (« popstar 3 » où j’ai atteint les quarts de finale). Dans le même temps, je sillonnais l’île avec mon groupe live, « Panach ». Nous reprenions les tubes de l’époque et quelques standards… Après avoir beaucoup interprété les chansons des autres, j’ai eu envie de composer: plusieurs collaborations musicales et deux albums solos plus tard, me voilà en interview sur Üart !
Comment passe t-on de professeur d’Histoire-Géographie à la chanson ?
A dire vrai, c’est plutôt l’inverse qui s’est produit. La musique et le chant ont précédé mon goût pour l’histoire et la géographie.
Disons, que dans la vie,
Après avoir obtenu un Baccalauréat litteraire, j’ai suivi les cours de Mme Elisabeth Landi et Monsieur Bruno Magallon-Graineau en classes préparatoires aux grandes écoles, au lycée de Bellevue. Ces professeurs passionnés m’ont insufflé l’envie d’enseigner à mon tour.il y a des gens qui vous inspirent et influencent durablement votre parcours.
Malgré ce choix professionnel, je n’ai jamais abandonné la musique, au contraire. Naviguer entre ces deux univers m’offre un équilibre. A y regarder de près, ils ne sont pas si opposés qu’il y paraît: sur scène ou dans mes classes, je suis face à un public, qu’il me faut toucher d’une manière ou d’une autre…
A quel âge as-tu commencé le chant ?
Plus tard, j’ai suivi des cours de piano mais je n’étais vraiment pas douée ! J’ai vite compris que le chant était ma voie… (rires)J’ai commencé le chant à l’âge de 9 ans.
Des parents musiciens ? Quels regards portent-ils sur toi aujourd’hui ?
Mélomanes et artistes dans l’âme, je dirais plutôt.
Je ne crois pas me tromper en disant qu’il sont plutôt fiers de leur fille… (sourire)
Peux tu nous parler du déclic opéré par la musique pour prendre cette place dans ta vie ?
Je ne peux pas réellement parlé de déclic dans la mesure où la musique a toujours été présente. Je dirais qu’elle prend une place de plus en plus grande parce qu’aujourd’hui, plus que jamais, je suis prête à m’abandonner à cet art et à cet univers exigeant.
Chaque concert me donne une impulsion supplémentaire et m’invite à me défaire des doutes qui m’animent encore… Je peux affirmer, enfin, vouloir réellement faire carrière dans la musique.J’aime l’idée que ma musique puisse toucher les gens au cœur.
Si je ne me trompe pas Lumina est ton premier titre solo, que peux-tu nous en dire ? Te considères-tu comme une Lumina ?
Oui, en effet,
sorti en 2007 (cela ne me rajeunit pas !!!) m’a révélée au grand public. Cette chanson retrace la vie de l’une des insurgées de l’Insurrection du Sud de 1870, insurrection sévèrement réprimée par les autorités coloniales de l’époque. Lumina fut condamnée au bagne en Guyane.« Lumina »
Prendre position face à l’injustice si jeune, force nécessairement l’admiration. A l’époque, Lumina était plutôt méconnue du grand public.J’admire son parcours, son courage, son audace.
C’est ce qui m’a poussé à chanter son histoire.
Nous avons tous, me semble-t-il, une part de « Lumina » en nous dès lors que nous ne restons pas indifférents aux maux de notre société et que nous assumons de dire « non » à ce qui nous dérange, nous choque ou nous révolte. S’interroger et refuser sont déjà des actes de rébellion… Vive Lumina !
Certains comparent ton timbre de voix à celui d’Edith leffel comment le vis-tu ?
Je dois avouer qu’au début j’ai été surprise. Je l’ai toujours pris comme un compliment parce qu’au-delà de son timbre, Edith Leffel était d’une sensibilité palpable et ses interprétations ont marqué toute une génération. Aujourd’hui, on me le dit de moins en moins. Cela me laisse penser que ma signature vocale se précise.
A travers des titres comme non, manzè madi, dramatik est-ce une façon de t’affirmer en tant que femme et d’encourager certaines à s’affirmer tout autant et se défaire des clivages sociaux ?
En dépit des énormes progrès opérés, nous sommes encore nombreuses à perdre de vue nos réelles ambitions et à les sacrifier sur l’autel des convenances sociales, religieuses ou culturelles.
Les titres évoqués sont indéniablement une manière de m’affirmer en tant que femme libre: libre d’aimer qui elle veut, libre d’assumer ses choix (mêmes les plus douloureux), libre de refuser une relation toxique. Bref, une femme libre d’être qui elle veut être, tout simplement, sans féminisme outrancié.La vie de beaucoup de femmes est encore faite de renoncements successifs qui leurs interdisent de s’épanouir.
L’amour semble être au cœur de tes textes, peux-tu nous en dire plus sur ton processus d’écriture ?
Oh oui ! L’Amour est une source d’inspiration intarissable pour moi. Selon moi, il est le socle de l’existence humaine: il précède la Foi car il mène à elle…
Lorsque j’écris, je n’ai pas de processus unique et pré-établi. Certains textes me viennent de manière très spontanée (on pourrait parler d’écriture automatique). D’autres sont plus longs à construire: je les peaufine, les laisse de côté, avant d’y revenir encore… La thématique de l’Amour n’est jamais loin.
Quel message souhaiterais-tu faire passer aux jeunes ou moins jeunes afin de les motiver à se réaliser pleinement ?
Je leur dirais simplement de croire en eux et en leur capacité à aller de l’avant. Je leur dirais aussi de s’affranchir du pessimisme ambiant.
Réussir dans la voie que l’on a choisie est une décision qu’il faut avoir le courage de prendre.
Qu’essaies-tu de transmettre à travers ta musique ?
Je la pense et je la vis comme un moyen d’expression tantôt cathartique, tantôt romantique. J’aime exprimer ce que je ressens, ce qui m’interpelle et l’échanger avec le public. Donner à ressentir, à s’émouvoir, à s’interroger ou même à s’indigner sont les objectifs que je vise de plus en plus.Pour moi la musique est émotion.
Faut-il être sensible pour transmettre des émotions et exercer ce métier ?
J’ai du mal à imaginer qu’un artiste puisse être insensible. C’est notre sensibilité qui nous amène à créer et à interpréter nos émotions au travers de notre art.
Petite, as-tu été inspirée par un ou des personnages emblématiques de la scène antillaise ou même internationale, en te disant je veux être comme lui ou elle et pourquoi ?
J’ai toujours été fascinée par les divas et les chanteuses à voix. Pour ce qui est de la scène antillaise,
Ses textes, son attachement à la langue créole, sa posture sur scène et l’émotion qu’elle communique à chaque concert font d’elle un modèle. Au niveau international, les influences sont nombreuses : Tracy Chapman, Tina Turner, Miriam Makeba, ou encore Witney Houston m’ont influencé à des degrés divers.j’ai toujours eu une profonde admiration pour Jocelyne Béroard.
En quoi puises-tu pour te dépasser au quotidien ?
Je ne cherche pas systématiquement à me « dépasser ». Je dirais plutôt que le plus important est d’être en phase avec moi-même (ma personnalité, mes valeurs, mes désirs, mes projets…). C’est loin d’être évident tous les jours.
Ma foi est essentielle.
Loriane en quelques mots clés ça donnerait quoi ?
« Loriane » : femme-aimante-drôle (ce sont mes amis qui le disent !)-exigeante.
L’amour c ‘est ?
L’Amour c’est un DON inestimable et gratuit.
Le bonheur c’est ?
À cette condition, on est en capacité d’accueillir ce que la vie nous offre et de s’en émerveiller.Pour moi le Bonheur c’est trouver sa place dans le monde et pouvoir dire « je suis exactement là où je dois être ».
Le meilleur compliment que l’on puisse te faire ?
Me dire que j’ai une jolie paire de chaussures : nooon, je plaisante !
J’aime l’idée que ma voix puisse toucher les cœurs. Alors, à chaque fois que je rencontre des personnes qui me le disent, je suis moi-même touchée en plein cœur.
Un rite avant chaque concert ?
Avant chaque concert, je prie. Souvent, avec les musiciens, on s’encouragent mutuellement afin de développer des énergies positives.
As tu une idée exacte du nombre de concert auxquels tu as participé depuis tes débuts ?
Wahouuuu ! Je ne les ai jamais comptés ! Beaucoup je dirais. Mais, j’en demande encore, et encore !
Qui as-tu accompagnée lors de ta première prestation scénique ? Quel souvenir en gardes-tu ?
Ma première prestations scénique remonte au concours de la chanson créole organisé par le SERMAC, au Grand Carbet. J’avais 9 ans à peine… Je me souviens avoir interprété « Marie-Clémence » de Léona GABRIEL. J’en garde un excellent souvenir !
Es tu fière de ton parcours ?
Ah, ça on en reparlera au crépuscule de ma vie ! (sourire)
Rendez-vous dans environ 30 ou 40 ans ! (rires)Il me reste encore tant de choses à accomplir.
L’artiste qui t’a le plus touché sur scène ?
Je ne saurais le dire. Tant de chanteurs me touchent. Le dernier en date en tout cas, est Lokua Kanza. J’ai eu le plaisir de le rencontrer au dernier festival de Marie-Galante.
Sa voix pure m’a littéralement transpercée…
En tant que professeur d’Histoire, penses-tu que notre condition « d’anciens esclaves » influence notre rapport à la culture ? Sommes nous libre aujourd’hui selon toi ?
Un vrai sujet de baccalauréat cet interview dîtes-mois ?!
Trêve de plaisanterie, l’esclavage a indéniablement influencé notre rapport à la culture dans la mesure où il a donné naissance à des pratiques liées aux syncrétismes culturels et religieux créés par la traite atlantique et la société d’habitation. Nos comportements, nos mentalités, notre langue créole, nos danses dites « traditionnelles » ou encore certains éléments de notre gastronomie locale pour ne citer que cela, sont autant d’éléments qui puisent souvent leur origine dans ce passé esclavagiste, auquel s’ajoutent l’immigration indienne et des décennies d’assimilation culturelle… Notre culture s’est construite à la lumière de tous ces éléments et c’est sans doute ce qui la rend si riche; c’est aussi ce qui rend notre rapport à elle parfois si complexe.
Nous le sommes juridiquement, mais il y a tant d’entraves invisibles mais tout aussi nocives… Vaste débat… Pour moi, la Liberté reste une quête…« Sommes-nous libre aujourd’hui ? »
L’art est-il accessible à tous ?
J’aurais tendance à dire non et c’est dommage.
: pour beaucoup l’art reste réservé aux amateurs. L’aspect financier est aussi un élément discriminant: pour beaucoup, l’art reste inaccessible et réservé à ceux qui ont clairement les moyens de faire l’acquisition d’œuvres souvent onéreuses.Franchir la porte d’une galerie ou d’un atelier d’artiste n’est pas « naturel » ou « aisé » pour tout le monde. Nous n’avons pas tous cette culture
Quelles problématiques rencontrent les artistes martiniquais selon toi ?
Je ne pourrais pas parler au nom de tous les artistes tant les domaines sont divers. Pour ce qui est de la musique, il me semble qu’à l’instar de la majorité des artistes nationaux,
la chute des ventes de disques et les difficultés à diffuser notre musique restent des problèmes majeurs.
Quelle est la force de nos artistes et à contrario que doivent ils développer dans les prochaines années ?
Notre force réside je crois dans notre nombre, dans notre diversité et dans le talent dont beaucoup font preuve. Mais, le défi pour l’avenir est de rester audibles et de continuer à susciter l’intérêt du public face à une offre musicale pléthorique et mondialisée. Pour cela, continuer à produire des spectacles et à multiplier les lieux où la musique s’écoute, se vit et s’apprécie en live, me semble fondamentale. Exploiter aux mieux les réseaux sociaux me paraît aussi incontournable.
Quelle est l’importance de la culture au sein de notre société?
Je reprendrais la célèbre citation de Marcus Garvey
La culture est pour moi essentielle mais elle ne doit pas nous couper des autres. Je la vois au contraire comme une manière d’exister, en sachant qui on est et en étant conscient de ce que l’on peut apporter aux autres en étant riche et fière de ce qu’on est.« un peuple qui ne connait pas son passé, ses origines et sa culture, est comme un arbre sans racines ».
Penses-tu que la jeune génération doive s’impliquer plus dans la culture? Et comment ?
J’ai juste envie de leur dire « connais-toi, toi-même »… En cela, il me semble que le rôle des parents est essentiel.
Parles nous un peu de ton actu, de tes projets pour l’année 2017 ?
Pour l’année 2017, j’espère pouvoir présenter mon troisième album solo.
Multiplier les concerts figure également en bonne place dans ma liste 2017 !
As-tu encore des rêves ? Lesquels ?
Oh ouiiii,
D’un point de vue personnel, je rêve d’être maman et de fonder une famille. Pour ce qui de la musique, je rêve de chanter aux quatre coins du monde et de rencontrer des personnes de tous horizons…Je rêve d’arriver au soir de ma vie en me disant, « Ma fille, tu as bien vécu : sans regret ! »je suis une grande rêveuse !
Sur quel grand projet aimerais-tu travailler ?
La comédie musicale me tente beaucoup…
Qui sait, un jour…
Spontanément sans trop réfléchir dans la série si tu étais
Si tu étais un animal tu serais ?et pourquoi ?
Un yorkshire (oui, ouiiii…) l’animal le plus affectueux que je connaisse.
Si tu étais un titre de film tu serais ?
Sur la route de Madison (Qui n’a jamais été à la croisée des chemins,
face à des choix cornéliens …) Je suis émue à chaque fois que je le regarde…
Si tu étais une époque de l’histoire tu serais ?
Vive l’époque contemporaine sans aucun doute (elle a vu mon peuple s’affranchir de l’esclavage et tant d’autres progrès sociaux sans lesquels ma vie serait tout autre).
Si tu étais une femme de la révolution tu serais ?
Olympe de Gouges.
Si tu étais une citation tu serais ?
Fais de ta vie un rêve et d’un rêve une réalité.
Si tu étais un geste d’amour tu serais ?
Un baiser (il communique et provoque tant de choses…).
Je vais te demander de fermer les yeux de faire appel à tes 5 sens et de me dire ce qui te vient quand on te dit Martinique.
, je sens la chaleur du soleil sur ma peau, j’entends le bruit des vagues qui dansent sur le rivage et les tambours qui grondent. Je vois cette clarté qui donne aux paysages des couleurs incroyables qui ne cessent de m’émerveiller. je me sens bien…Quand on me dit « Martinique »
je suis chez moi.
Merci encore pour ce moment privilégié en espérant te voir très bientôt
ÜART
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Rose
Très belle interview pleine de sincérité et d’optimisme. Loriane Zacharie est une artiste qui sait transmettre beaucoup de choses grâce à une voix chaleureuse et une écriture fine. J’attends avec impatience son 3ème album !
PS : c’est vraiment un plaisir de l’entendre chanter en créole !